Les rêves suscitent d’ailleurs bien d’autres questions connexes : comment pensent et rêvent les bébés qui ne savent pas encore parler ? Dans quelle langue rêve-t-on (et pense-t-on), quand on en parle plusieurs couramment, ou encore quand on vit au quotidien dans un autre pays que son pays natal ?
Toutes ces questions ont un début de réponse commune : nos pensées et nos rêves, avant de « s’afficher » ou de « s’imprimer » dans notre esprit sous forme de mots, sont d’abord des sons, des images, mais aussi des odeurs, des goûts ou des sensations tactiles. D’où viennent-ils ? De nos souvenirs, bien sûr ! Notre cerveau, tel un magnétoscope, enregistre à longueur de journée ce que nous voyons, entendons, sentons et touchons. Oups, et bien sûr, ce que nous goûtons. On dit d’ailleurs que les vrais gourmets profitent deux fois de leur dîner. D’abord à table, et ensuite dans leur lit, quand ils en rêvent !
Conséquence, pour pouvoir rêver en images, il faut en avoir enregistré dans la journée, ou en tout cas dans sa vie. De facto, les aveugles de naissance ne rêvent pas en images. Mais comme leurs autres sens sont surdéveloppés pour compenser l’absence de la vue, leurs rêves sont remplis de sons, d’odeurs, et surtout de sensations tactiles.
Pour ceux qui ont perdu la vue plus tard, le scénario est différent. En théorie, ils rêveront en images toute leur vie. Seulement, leurs souvenirs s’estompant avec le temps, ces rêves « en vidéo » s’éloigneraient lentement de la réalité, en particulier pour ce qui touche aux couleurs. Une autre variable entre en ligne de compte : l’âge auquel l’aveugle a perdu la vue. On dit que c’est autour de sept ans que les choses basculent. Avant, les souvenirs en images disparaîtront au fil du temps, en une dizaine d’années tout au plus. Après, ils persisteront toute la vie. Jusqu’à preuve du contraire…
