Parmi vos amis, vous avez des médecins, avocats, consultants, commerciaux, chefs d’entreprise, des fonctionnaires, des chômeurs – « je suis entre deux postes, je vais faire un bilan de compétences ! » – ou encore des rentiers… Mais des pilotes de Formule 1, des cosmonautes (russes), astronautes (américains) ou des spationautes (français), beaucoup moins, voire pas du tout. Moi, si, j’ai eu l’honneur de croiser nos deux spationautes Claudie et Jean-Philippe Haigneré à plusieurs reprises. On s’écrit même, avec Claudie. Enfin, elle m’a envoyé un adorable petit mot quand je lui ai dédicacé mon dernier bouquin : ça fait toujours plaisir venant d’une femme aussi dynamique, qui a réussi tant de choses dans sa vie.
Mais bon bref, ce n’est pas le sujet. Des pilotes de F1 ou de navette spatiale, point dans votre carnet d’adresses, comme vous n’y trouverez point non plus… d’arachnologiste.

Imaginez la scène, à dîner, un soir, à l’heure des présentations : « Et toi, tu fais quoi ? » Le silence glacial s’installe : je suis arachnologiste ! Ça impressionne. Sans compter que l’expert en araignées a du pain sur la planche, pardon des pattes sur la paillasse, avec pas moins de 40 000 espèces répertoriées à ce jour à connaître et à étudier. Vous imaginez le cauchemar, surtout s’il ramène du travail à la maison le soir ou le week-end ?
Pourtant, c’est bien regrettable que vous n’ayez pas d’arachnologiste dans vos amis, car vous pourriez avoir des discussions pas-sion-nantes à table : est-ce que les araignées font de bons plats de résistance comme dans Indiana Jones ? Y a-t-il des araignées mangeuses d’homme ? En combien de temps une morsure d’araignée venimeuse tue-t-elle ? Si une araignée rentre dans une narine ou dans une oreille, jusqu’où peut-elle aller ? Bref, que du bonheur !
Mais à défaut d’en avoir un sous la main, il est une question qui épatera vos convives si vous jouez, vous, à l’arachnologiste : comment les araignées tissent-elles leur toile ? Comment une si petite bestiole est-elle capable de concevoir une structure aussi complexe, aussi parfaite que la toile d’araignée ?
D’abord, il faut savoir que sur les 40 000 espèces d’araignées connues, seule une dizaine joue du fil de soie. D’autres, par exemple, creusent des trous pour piéger leurs proies ou encore mordent et paralysent avec leur venin des animaux parfois dix fois plus gros qu’elles avant de les boulotter : c’est le cas de la sympathique mygale…
Côté intendance, l’usine à fil de soie située dans l’arrière-train de la gentille petite bête à huit pattes ne produit pas une, mais six variétés de fils, une pour chaque usage. Lui faut-il se déplacer ? Un fil non collant sort de l’usine. Jouer à l’acrobate, dans le vent, pour aller accrocher la toile ? Un fil de sécurité, plus résistant que les autres, entre en production. La toile elle-même est bien sûr constituée d’un fil collant dit de capture, quand d’autres servent à fabriquer le cocon emprisonnant la proie. Il existe même un fil pour se fabriquer un abri, lorsque l’araignée attend, patiemment, qu’un insecte vienne se faire piéger.
Pour tisser la toile, Dame arachnide commence par dessiner un Y, en faisant s’envoler un fil qui ira s’accrocher au petit bonheur la chance, ou encore en se laissant pendre au bout de celui-ci pour trouver un point d’appui. Ensuite, c’est en cercles concentriques que l’araignée construira sa nasse, ajoutant de nouveaux rayons pour renforcer la structure. Temps de travail moyen, une demi-journée à une journée, sauvagement anéanti en deux secondes par votre balai dans les coins du plafond.
Le plus fou, c’est la taille du fil de soie, que l’on voit pourtant distinctement, en particulier, il est vrai, lorsqu’il devient un peu poussiéreux, ou couvert de rosée. Ce qui sort du fondement de l’araignée fait la taille d’un micron, autrement dit d’un millième de millimètre. Quand on se dit que l’animal, en produira plusieurs centaines de mètres dans sa vie… On est bien content de ne pas être tous dotés des mêmes pouvoirs que Spiderman !
